Histoire du Panama. Portobelo, attaques des corsaires et des pirates (2)

Publié le par Michel Lecumberry

  Durant la deuxième partie du siècle, les Anglais et les Hollandais sont devenus les maîtres des océans et en 1670 le traité des Amériques met fin aux hostilités entre l’Espagne et l’Angleterre.

  En 1679, Portobelo est attaqué par deux flibustiers, l’Anglais John Coxon et le Français Lassonde qui se sont rencontrés aux îles San Blas. Avec leurs deux cents hommes, aidés par des indigènes, ils mettent trois nuits, se cachant le jour, pour s’approcher et surprendre les habitants avant de les piller. Ils saccagent les faubourgs de la ville mais ne s’attaquent pas aux forts. Se sont les derniers pirates à tenter des attaques, les anciens pays ennemis estimant que le commerce rapporte plus que les guerres passent des accords pour faire barrage à ces actions de pirateries.

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  De son côté le Gouverneur de Saint Domingue, Jean Baptiste de Casse, contrôle les boucaniers de la Tortuga. Leur dernière action sera d’aider une expédition française pour capturer Cartagena de Indias. De Casse, après avoir touché la rançon, propose d’attaquer Portobelo mais une fois sur place la bataille ne sera pas engagée. Les boucaniers se dispersent, ceux qui veulent continuer la piraterie seront considérés comme bandits et poursuivis.

  La contrebande s’amplifie, les marchands de Panamá achètent en se cachant, même durant les jours de foire, à des bateaux hollandais mouillés à Bastimentos (à quelques kilomètres au nord-est de Portobelo).

  Pour faire barrage à ce trafic, qui met en danger le commerce légal, une flottille de corsaires espagnols est constituée en garde-côtes pour arraisonner les bateaux de contrebandiers. Mais ces corsaires ne font pas toujours la différence entre contrebande et commerce légal, de nombreux bateaux anglais en font les frais.

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   En 1731, un garde côte espagnol commandé par le capitaine Juan León Fandiño arraisonne indûment le Rebecca, un brigantin commandé par le capitaine Robert Jenkins. Fort de son droit l'Anglais réagit très mal et tente de s'opposer à la fouille de son bateau. Le commandant espagnol le fait attacher au mât, pille la cargaison licite, pour le punir lui coupe une oreille et laisse repartir le bateau à la dérive : "va et dis à ton roi que je lui ferais de même s’il osait me défier". Jenkins, bon marin, réussit à regagner l’Angleterre sans les instruments de navigation saisis par les Espagnols. Pendant sept ans le récit de cette mésaventure fait le tour des tavernes de Londres.

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  En 1738, à la Chambre des Communes,  au cours d’une tentative de renversement du premier ministre Walpole, qui s’oppose à une nouvelle guerre avec l’Espagne, le capitaine Jenkins est appelé à témoigner. Exhibant le flacon qui contient son oreille, il rapporte la phrase de menace proférée par Fandiño au moment de son acte barbare. C’est la goutte qui fait déborder le vase. Les très respectables "Members of Parliament" trouvant qu'il y a là outrage impardonnable commis à l'encontre de sa Majesté et du courageux amputé, le Vice Amiral Vernon se verra confier le commandement de six navires de guerre pour aller détruire trois positions espagnoles des Caraïbes : La Guaira, Portobelo et Cartagena de Indias.  

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  L’Amiral, parti d’Angleterre avec ses six bateaux, armés chacun de cinquante à soixante-dix canons, fait escale à la Jamaïque et arrive pour attaquer Portobelo le 20 novembre 1739. A l’entrée de la baie, le fort de San Felipe, (le “Château Tout en Fer”) n’est occupé que par 150 soldats mais le Commandant fait hisser le pavillon de défi. De demi-heure en demi-heure le Hampton Court, le Norwich, le Worcester, le Princess Louisa, le Strafford et le navire amiral Burford entrent dans la baie et font feu tandis que la troupe débarque pour prendre d’assaut la batterie basse. Après deux heures de combat le célèbre fort rend les armes, cinq officiers et trente cinq soldats sont fait prisonniers.

  Le lendemain Vernon se prépare pour attaquer les autres forts. Le Gouverneur Francisco Martines de Retes conscient de la supériorité des Anglais préfère capituler, en échange il peut se retirer avec les honneurs militaires. Vernon s’empare alors de la trésorerie, des armes et des bateaux qui se trouvaient dans la baie mais ne touche pas à la population et relâchera les prisonniers à son départ.

  Il déclare la baie de Portobelo zone libre et le commerce légal (et illégal…) peut reprendre*.

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Note:

*- Vernon aura vengé Jenkins le mutilé en détruisant les forts de Portobelo et de San Lorenzo. Des médailles seront frappées pour célébrer "our Porto Bello man". Mais sa renommée fut mise à mal lorsqu’en 1741, malgré ses 23500 hommes et 186 navires il échoua dans sa tentative de la prise de Cartagena de Indias (Carthagène), abandonnant le siège au bout de 67 jours de combats. Cet échec fût d’autant plus humiliant que Blas de Lezo, qui commandait la place, n’avait sous ses ordres que 3000 soldats, quelques indiens et six frégates. Toutefois, des quartiers de Londres et Dublin s’appellent Porto Bello en mémoire de son exploit antérieur. Précisons aussi que le surnom de l’amiral Vernon était "Old Grog" car il est l’inventeur de cette boisson chaude.

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