Une famille de voyageurs découvre le Darién du Panama (5) Visite de Yaviza
Nous voilà à l'aube de notre dernier jour de cette découverte du Darien. Le temps a coulé très vite, trop vite, sur-occupé qu'il était de tant d'explorations extraordinaires, de superbes rencontres de toutes sortes et de soyeux moments de détente conviviale.
Aujourd'hui nous allons vers Yaviza, petite ville au bout du bout de la route panaméricaine. Que vous veniez en voiture, à moto ou encore en camping-car, arrivant d'Anchorage, de Radisson*1 ou simplement du Lodge Filo del Tallo, vous devrez stopper ici votre véhicule. Si vous voulez atteindre la Colombie, reste une solution: passer le pont suspendu piétonnier qui enjambe le Chucunaque et enquiller le sentier qui fait face. Un seul hic… la police des frontières vous bloquera très vite. Notez, que d'un autre côté, les préposés du SENAFRONT vous éviteront ainsi quelques 80 km de sentier en pleine montagne, couverte de forêt vierge pas toujours des plus hospitalières.
La petite ville très commerçante, cultivateurs et éleveurs arrivent chaque jour en pirogue pour négocier leurs produits agricoles, compte un peu plus de 4000 habitants. La population est majoritairement constituée de descendants des esclaves africains de la colonisation et d'indigènes Embera et Wounaan, mais on trouve aussi des colons venus d'autres provinces du pays, en particulier de la région de l'Azuero, pour chercher de meilleures terres. Quelques expatriés colombiens complètent la palette multicolore et bien vivante de la petite cité historique.
Surplombant le fleuve, se trouvent les ruines du petit fort San Gerónimo*2. Stratégiquement bien placé, il fût construit entre 1760 et 1762 pour protéger la ville, alors capitale de la région, des attaques de pirates britanniques et français qui convoitaient l'or extrait des mines des environs.
Juste en face des ruines vient d'être reconstruit le petit musée qui a été détruit lors des terribles inondations de décembre 2010*3. La plus grande partie des objets présentés dans l'ancien établissement ont été détruits mais grâce à une fondation et à des bénévoles les visiteurs peuvent à nouveau découvrir quelques pièces intéressantes.
Il faut bien sûr se balader à pied dans les petites rues bordées de maisons aux couleurs chatoyantes caribéennes et passer sur le pont pour avoir une vue impressionnante sur le fleuve. De petits restos sympas, ceux situés près du marché sont très animés aux bonnes heures, vous proposeront une cuisine locale rustique mais délicieuse.
Le sentier d'en face peut mener jusqu'en Colombie...
L'après-midi sur le chemin du retour, Michel Puech, qui s'est joint à nous pour la journée, nous fera découvrir une scierie industrielle mobile installée actuellement dans la forêt en bordure du Chucunaque à La Peñita. Il nous faudra traverser le fleuve en pirogue et patauger dans la boue de la rive escarpée avant d'atteindre le site où les énormes troncs d'arbres exotiques sont débités en planches. Les machines sont démontables ce qui rend possible cette installation itinérante au gré des zones de coupe. Le WWF et US-AID, les ONG impliquées dans la protection de la nature et dans le développement durable ont mis en place cette organisation dans le Darien. Le projet prévoie de couper un arbre par hectare chaque 10 ans sur une étendue de 66000 hectares. Cela fournit du travail à environ 35 employés dont la quasi-totalité sont des Emberas qui touchent ici, dans leur réserve, un salaire très correct*4 sans être obligés d'aller chercher du travail dans les grandes villes.
Le séjour de la petite famille de voyageurs va se terminer par une sympathique dernière soirée passée au Filo del Tallo. Le retour vers la capitale est prévu demain matin, la besace bien garnie de souvenirs de cette magnifique découverte du Darien. Léo et Thomas auront beaucoup de belles histoires illustrées d'impressionnantes photos pour épater leurs petits camarades lors des retrouvailles de la rentrée scolaire.
Notes:
*1- Radisson, localité de la municipalité québécoise de La Baie-James, c'est la communauté francophone la plus au nord du Québec, des Amériques et même du monde.
*2- Ne pas confondre avec le Fuerte San Gerónimo de Portobelo
*3- Entre le 8 et le 15 décembre 2010, tout l'est du Panama fût touché par des dégâts très importants dus à des pluies diluviennes qui se sont abattues depuis la mi-novembre. La grande majorité des habitants de Yaviza furent évacués vers Metetí. A Portobelo, de terribles glissements de terrain ont entraîné la mort de 13 personnes.
*4- Ces employés touchent en moyenne une rémunération de 20 à 25 $ par jour. Signalons qu'au Panama, le salaire mensuel minimum fixé par la loi pour 2012 se situe entre 430 et 490 $ en fonction des zones et des secteurs d'activité.