La Fête du Cristo Negro de Portobelo (1) la couleur pourpre

Publié le par Michel Lecumberry

   Depuis le début du mois d’octobre, en particulier les fins de semaines, une activité inhabituelle pour la petite ville, ordinairement tranquille, se manifeste. Les cloches annoncent de nombreuses messes pour les fidèles adorateurs du Cristo Nazareno qui ne pourront être présents le grand jour anniversaire. Le violet des tuniques, éclot peu à peu comme fleurs venant piqueter le bitume.

laroute

   La semaine du 21 octobre l’animation redouble d’intensité pour atteindre son point culminant le jour dit. Chaque année le village reçoit entre vingt et trente mille pèlerins qui arrivent de tout le Panama et pour certains de pays lointains. Les tuniques, mauves jonquilles aquatiques, envahissent peu à peu la marée humaine qui submerge les rues.

pelerin11-3

pelerin5   La petite ville a aussi été envahie par les étals de marchands en tous genres, débits de boissons et de nourritures, stands de jeux de hasard et loteries, ventes de souvenirs, de bimbeloteries et de milliers de cierges qui vont trembloter le soir dans leur fragile abri de verre. Le turbulent brouillard des saucisses grillées se mêle désormais à la douceur orientale des encens du recueillement.

etal3

etal5   Les pélerins ont revêtu la "toga". Cette longue tunique violette signifie qu'ils font une "manda": ils viennent pour implorer ou pour remercier "leur" Cristo Nazareno. Beaucoup ont parcouru des dizaines de kilomètres à pied pendant plusieurs jours. Les pénitents finissent leur parcours depuis l’entrée du village en marchant à genoux, certains rampent sur le ventre, d’autres sur le dos. Cette année le bitume était chauffé à blanc par un soleil peu compatissant.

coiff6

   Dans le petit groupe qui accompagne et encourage le pénitent, l'un des membres se déplace à reculons d'un pas chaloupé, plié en deux pour lui présenter une petite statue du Nazareno, il peut ainsi la fixer constamment des yeux.

penit4

penit30
penit6

    A bout de force, ils atteignent le parvis de l'église et doivent encore se frayer un passage dans la grande nef, rampant aux pieds de la foule compacte qui assiste à des messes.

   Enfin, arrivés au bas de la plate-forme où le Nazareno, sorti de son abri habituel, a été placé, ils adressent leur prière avant de s'écrouler, épuisés. Les infirmiers et leurs civières ne chôment pas.

penit30-5    Les milliers de pèlerins passent également près de la statue, des préposées recueillent les dons qu’elles glissent dans un tronc aux dimensions généreuses. Sur le char, un homme épingle sur la tunique les petites médailles, les “milagros”, qui lui sont confiées. Elles sont les représentations d’un vœu ou d’une offrande.

cristoanda1

    La lourde plateforme, la “Anda”, est de forme rectangulaire et prévue pour être portée par une cinquantaine d’hommes. Pour la décorer richement, des paroissiennes ont confectionné des cierges en forme de fleurs avec de la cire d’abeille provenant spécialement d’Espagne pour cette occasion. Le Cristo à été revêtu de sa belle robe “color vino” (couleur lie de vin) et sur l’épaule il porte la lourde croix de son calvaire du Golgotha.

simon1

    A l’arrière de celle-ci, un curieux petit bonhomme est venu l’aider. Il est barbu et blanc de peau, habillé d’un étrange ensemble couleur kaki, cravaté de rouge, une médaille sur la poitrine et porte même, dit-on, des sous-vêtements. Si quelques personnes bien informées peuvent, se référant sagement aux Saintes Écritures, dire qu’il s’agit de Simon de Cyrène, aucune n’a su me dire pourquoi cette tenue inattendue…

   Tout est en place pour le point d'orgue de la fête: la procession nocturne.

 

 

(à suivre...)

Publié dans Portobelo

Commenter cet article